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Publié par C. Denis - LDH49

 

Ce jeudi 08 avril, la première discussion sur la proposition de loi « donnant le droit à une fin de vie libre et choisie », déposée par le député Olivier Falorni le 17 octobre 2017, aura lieu à l’Assemblée nationale 

 

Le contenu de la proposition de loi  

 

Alors que certains journalistes mélangent les notions « d’euthanasie » et de « suicide assisté », il faut de suite en rappeler les définitions, tant les mécanismes sont différents.  

 

Par euthanasie, il faut comprendre : étymologiquement, une « bonne mort », juridiquement, l’acte consistant à provoquer volontairement le décès d’autrui, soit par action (active), soit par omission (passive). L’euthanasie est interdite en France, on parle alors d’homicide volontaire en droit pénal. 

 

Par suicide assisté, le suicide avec assistance médicale ou encore assistance au suicide, il faut entendre le fait de donner à autrui les moyens de se donner la mort. Cette pratique se retrouve aujourd’hui en droit suisse. 

 

Ce jeudi, de quoi les députés vont-ils débattre ? L’article 1er de la proposition de loi prévoit de modifier l’article L.1110-9 du code de la santé publique afin d’y ajouter que : « Toute personne capable majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, lui infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée ou qu’elle juge insupportable, peut demander à disposer, dans les conditions prévues au présent titre, d’une assistance médicalisée permettant, par une aide active, une mort rapide et sans douleur. » Il s’agit donc de légaliser en France l’euthanasie, et non pas le suicide assisté.  

 

Plus précisément, que prévoit cette proposition ? Courte mais suffisamment détaillée, en voici les grandes lignes 

  • - Demande exclusive du patient ; 

  • - Avis du médecin traitant ; 

  • - Avis obligatoire de deux autres praticiens ; 

  • - Avis possible de tout membre du corps médical ; 

  • - Vérification d’un consentement libre, éclairé et réfléchi lors d’un entretien dirigé par le médecin traitant et les deux praticiens ; 

  • - Information relative aux soins palliatifs lors de cet entretien ; 

  • - Possibilité pour le patient de révoquer à tout moment sa demande ; 

  • - Versement au dossier médical du patient des conclusions médicales obtenues après entretien et de la demande sont ; 

  • - Envoi du dossier médical sous 4 jours suivant le décès à la commission nationale de contrôle des pratiques relatives au droit de mourir dans la dignité ; 

  • - Vérification par la Commission du respect des exigences légales ; 

  • - Si oui, dépénalisation de l’aide à la mourir pour le corps médical qui ne peut être accusé d’assassinat ou d’empoisonnement ; 

  • - Si non, la Commission peut saisir le Procureur de la République. 

  • - Si la personne est dans l’incapacité d’exprimer son consentement ; 

  • - Suivi de ses directives anticipées ; 

  • - Demande de la personne ou des personnes de confiance. 

  • - Clause de conscience pour le corps médical. 

  

Regard global sur la proposition de loi  

 

La proposition de loi veille donc à un encadrement strict du mécanisme d’euthanasie qui rappelle le modèle belge. En effet, les Pays-Bas, en 2001, sont les premiers à légaliser cette pratique, suivis un an plus tard de la Belgique. Le Luxembourg pratique également l’euthanasie. Enfin, depuis peu, notre voisin espagnol l’a légalisé.  

 

Il est à noter qu’en 2002, la Cour européenne des droits de l’Homme avait conclu que l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’Homme relatif au droit à la vie, ne saurait être interprété comme permettant un droit à mourir (arrêt Pretty c. Royaume-Uni).  

 

Toutefois, depuis 2011, elle ne se prononce plus et rappelle que les Etats disposent d’une grande marge d’appréciation dans ce domaine (arrêts Haas c. Suisse, 2011 ; Lambert et autres c. France, 2015). En 2017, elle réaffirme qu’il n’y a pas de consensus des Etats sur ces questions et que la marge d’appréciation est particulièrement plus grande lorsque l’affaire présente des questions délicates d’ordre moral et éthique (arrêt Gard et autres c. Royaume-Uni).  

 

D’ores et déjà, nous regrettons les 3000 amendements dont 2200 sont à répartir entre 5 députés Les Républicains et qui visent à neutraliser cette proposition de loi et à bloquer toute discussion efficace. De même, nous espérons qu’aucun intervenant extérieur ne viendra interférer dans la discussion.  

 

L'ouverture d'un débat sur cette question, si nécessaire en démocratie, remet la notion de dignité au cœur de la loi. Ainsi, « L’impératif doit bien être celui‑ci : se fonder sur le respect de la volonté exprimée par le malade, sur le libre choix par chacun de son destin personnel, bref sur le droit des patients à disposer d’eux‑mêmes. Ultime espace de liberté et de dignité. » Quant à certain.e.s qui prétendent que nous dévoyons la notion, il faut, sur un sujet aussi clivant, sensible, douloureux, remettant en question des conceptions philosophiques, religieuses et sociétés, savoir écouter et prendre en considération la parole des malades, souffrants et de leurs proches. A ce titre, le tourisme de l’euthanasie existe et le nombre de touristes français allant en Belgique est en hausse – un point qu’on ne peut ignorer.  

 

Pour ceux qui le souhaitent, nous vous invitons à la lecture : 

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