Kurdistan : ne laissons pas un massacre en cacher un autre
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Par Le collectif Voix pour la paix au Kurdistan avec le soutien d’une centaine d’intellectuels Parmi les premiers signataires : Ariane Ascaride, Patrick Chamoiseau, Annie Ernaux, Edgar Morin
Alors que l’armée turque intensifie ses frappes dans la quasi-indifférence, plus d’une centaine de personnalités se réuniront à Marseille, le 13 janvier, pour empêcher l’anéantissement du peuple kurde et soutenir les voix de paix.
A Marseille, le 13 janvier (1), nous nous réunirons pour rendre plus forte la voix des appels à la paix venant de Turquie. Récemment, 78 journalistes, artistes, intellectuel·les, défenseur·es des droits humains kurdes et turc·ques ont lancé un appel pour attirer l’attention sur l’urgence d’une solution pacifique. Nous reconnaissons leur courage, alors que la situation au Kurdistan ne cesse de se tendre, et que le précédent appel pour la paix («Nous ne serons pas complices de ce crime», en 2016) a été qualifié de propagande terroriste par le gouvernement turc et a causé la persécution de ses signataires. Nous entendons relayer, protéger et amplifier leur voix.
Dans un contexte marqué par les politiques militaristes, par la banalisation de toutes les horreurs, les foyers de violence extrême ne cessent de se multiplier au Moyen-Orient. Après le nettoyage ethnique de la population arménienne du Haut- Karabakh dans l’indifférence de la communauté internationale, nous assistons impuissant·es au déchaînement de violences et au massacre par des pouvoirs militaristes des populations israéliennes et palestiniennes.
Briser le cercle vicieux de la violence et de la haine Les foyers de violences extrêmes qui embrasent le Moyen-Orient ne sont pas isolés, ni les uns des autres ni du reste du monde. Ils sont pris dans les filets d’un militarisme mondialisé et sont les maillons d’une chaîne d’idéologies nationalistes qui se ressemblent désespérément. Ne laissons pas la chaîne s’agrandir et se refermer. Ne laissons pas un massacre en cacher un autre. Il nous faut tout mettre en oeuvre pour briser le cercle vicieux de la violence et de la haine, avant qu’il ne soit trop tard. Avant que l’horreur ne s’ajoute à l’horreur. En résonance avec d’autres voix qui s’élèvent dans le monde entier pour en appeler au cessez-le-feu et à la paix en Israël et en Palestine, nous élevons les nôtres pour que le peuple kurde ne soit pas oublié.
Aujourd’hui, l’Administration autonome du nord et de l’est de la Syrie relate qu’entre le 5 et le 9 octobre l’armée turque a mené des opérations massives dans ces régions – 580 frappes aériennes et terrestres ont été dénombrées -, faisant des dizaines de morts dans la population civile et détruisant systématiquement non seulement les infrastructures qui permettent d’alimenter en eau et en électricité des millions de personnes, mais aussi des écoles et des bâtiments administratifs.
Dizaines de milliers d’opposant·es enfermé·es L’AANES «exhorte toutes les parties prenantes en Syrie, les institutions des Nations unies, le Conseil de sécurité des Nations unies et les organisations de défense des droits de l’homme à adopter une position ferme contre les actions menées par la Turquie». Chaque jour les Kurdes comptent leurs victimes. Pendant ce temps, de l’autre côté de la frontière, plusieurs dizaines de milliers d’opposant·es politiques, surtout kurdes, et principalement des femmes – dont des députées et des mairesses -, sont enfermé·es dans les prisons du régime autoritaire turc qui veut étouffer toute voix de paix. Le gouvernement turc alimente volontairement la colère des Kurdes en maintenant Abdullah Ocalan, leader du mouvement kurde qui avait joué un rôle capital dans les négociations de paix en 2013 et 2015, en prison dans un isolement total, sans signe de vie depuis trente mois.
Le 13 janvier, en prenant au sérieux les signaux alarmants d’une autre guerre qui risque de prendre une ampleur incontrôlable, nous nous réunirons pour dire qu’il n’est pas trop tard. Nous nous réunirons pour empêcher l’anéantissement d’un peuple et pour porter haut et fort les voix de paix qui nous viennent de Turquie et du monde entier.
(1) Rendez-vous le 13 janvier, à 14 heures à la bibliothèque de l’Alcazar, 58 cours Belsunce à Marseille.
La liste des 121 signataires :
Joseph Andras, écrivain
Maryse Artiguelong, vice-présidente de la FIDH
Ariane Ascaride, artiste
Geneviève Azam, écrivaine et administratrice de la Fondation Danielle Mitterrand
Pierre Bance, juriste, auteur
Katy Barasc, philosophe, auteure
Rim Battal, poétesse et autrice
Alexis Baudelin, avocat au barreau de Paris
Patrick Baudouin, avocat, président de la LDH (Ligue des droits de l’Homme)
Maïten Bel, économiste
Bruno Bernard, président de la métropole de Lyon
Janet Biehl, écrivaine
Oristelle Bonis, éditrice
Patrice Bouveret, directeur de l’Observatoire des armements
Rony Brauman, médecin, ex président de MSF
Henri Braun, avocat au Bureau de Paris
Christian Bruschi, professeur de droit émérite
Claude Calame, anthropologue
Philippe Cazal,journaliste, conseiller municipal de Narbonne
Moutsie Claisse, écrivaine, ethnobotaniste
Silvia Yuri Casalino, directrice de l’association Eurocentralasian Lesbian* Community
Gérard Chaliand, écrivain, journaliste
Patrick Chamoiseau, écrivain
Joelle Chalavoux, conseillère départementale de l’Aude
Nina Chastel, journaliste
Maryam Chémirani, musicienne
Sylvestre Clancier, président d’honneur du PEN Club de France
Jean Marc Coppola, adjoint maire de Marseille
Françoise Cotta,avocate à la Cour de Paris
Emmanuelle Dancourt, journaliste, autrice
Pierre Dardot, philosophe
Javad Djavahery, auteur et producteur
Jean-Pierre Djukic, directeur de recherche, Université de Strasbourg
Zehra Doğan, journaliste, artiste
António Pedro Dores, sociologue (Portugal)
Grégory Doucet, maire de Lyon
Delphine Durand, poétesse
Murat Durmaz, ancien maire de Ozalp, mairie confisquée
Marianne Ebel, philosophe et sociolinguiste
Henri Eckert, sociologue, professeur des Universités
Didier Epsztajn, animateur du blog « entre les lignes entre les mots”
Asli Erdogan, écrivaine
Annie Ernaux, écrivaine
Jules Falquet, philosophe
Sepideh Farsi, réalisatrice
Didier Fassin, anthropologue et médecin
Eric Fassin, sociologue, professeur des Universités
Nina Faure, documentariste et autrice
Barbara Glowczewski, anthropologue,directrice de recherche émérite du CNRS
Marie-Louise Gourdon, Maire adjointe à la culture de Mouans-Sartoux et Commissaire du Festival du Livre de Mouans-Sartoux
Robert Guédiguian, réalisateur
Elie Guillou, écrivain, metteur en scène, musicien
Jacqueline Heinen, sociologue
Beat Hrisbrunner, prof. émérite en informatique, université de Fribourg (CH)
Sylvie Jan
Laurent Jeanpierre, politologue
Fanny Jedlicki, sociologue
Samuel Johsua, professeur émérite sciences de l’éducation
Philippe Kalfayan, juriste, docteur en droit, ancien secrétaire général de la FIDH
Alexandra Koszelyk, écrivaine
Yasmina Kramer, journaliste, écrivaine
Christian Laval, philosophe
Genèvieve Legay,altermondialiste
Maud Leroy, éditrice
Alain Le Sann, agrégé d’histoire
Coline Linder, musicienne, peintre
Olivier Liron, écrivain
Carine Lorenzoni, journaliste
Maryam Madjidi, écrivaine
Pascal Maillard, universitaire
Chowra Makaremi, anthropologue
Carol Mann, historienne, sociologue
Valérie Manteau, écrivaine
Sylvie Mateo, enseignante
Halima Menhoudj, première adjointe de la Mairie de Montreuil,
Danielle Michel-Chich, écrivaine
Gilbert Mitterrand, président de la Fondation Danielle Mitterrand
Alice Mogwe, présidente de la FIDH
Nathalie Moineau, professeure de musique en Conservatoire
Sylvie Monchatre, sociologue, professeure des Universités
Léonore Moncond’huy, maire de Poitiers
Jean Michel Morel, journaliste, écrivain
Corinne Morel Darleux, écrivaine
Edgar Morin, sociologue, écrivain
Fred Nevché, chanteur, poète et musicien
Elisabeth Nicolini, Alliance des Femmes pour la Démocratie
Rina Nissim, écrivaine
Anna Nozière, autrice
Naz Oke, journaliste, artiste
Edmée Ollagnier, psycho-sociologue
Frédéric Paulin, écrivain
Pascaline Pavard, auteure, rédactrice en chef de la revue Nature & Progrès
Dénis Péan, artiste
Michel Peraldi, anthropologue, directeur de recherche, EHESS
Jacques Perreux, président de l’association Ami-es de Roya
Serge Pey, poète
Alessandro Pignocchi, auteur et dessinateur
Ernest Pignon Ernest, peintre
Nathalie Quintane, écrivaine
Alain Refalo, porte-parole du Mouvement pour une alternative non-violente (MAN)
Robin Renucci, acteur, réalisateur, directeur du Théâtre de la Criée, Marseille
Philippe Rio, maire de Grigny
Alex Robin, journaliste
Titi Robin, musicien
Michel Rodde, cinéaste
Laurine Rousselet, poétesse
Azucena Rubio, présidente de l’Assossiation Voltairine et ses Ami-es
Michèle Rubirola, soignante, 1ère adjointe au maire de Marseille
Mylène Sauloy, journaliste, auteure, réalisatrice
Mathieu Schneider, professeur des universités, président du Réseau MEnS
Anne Steiner, sociologue
Pierre Tevanian, philosophe, co-animateur du site LMSI
Sylvie Tissot, sociologue, Université Paris 8, co-animatrice du site LMSI
Hélène Trailin, designer, basketteuse
Mathieu Tulissi Gabard, écrivain
Beata Umubyeyi Mairesse, écrivaine
Christine Villeneuve, Co-coordiantrice des Editions des Femmes Antoinette Fouque
Marina Vlady, actrice, chanteuse et écrivaine
Olivier Weber, écrivain, réalisateur
Jean Ziegler, anc. rapporteur spécial des Nations Unies
Laurent Ziegelmeyer, militant de la cause kurde