Mixité sociale : l’école privée pas exemplaire et peu volontaire
Médiapart a publié un article avec ce titre le 3 février 2023. (A lire ICI ou LÀ).
« L’enseignement privé est sur le point de devenir définitivement la chasse gardée des classes moyennes et supérieures. Pour redresser la barre, il demande surtout de nouvelles aides de l’État, en refusant les contraintes. Quelques voix minoritaires tentent de faire bouger les choses en interne. » [Médiapart]
Le ministère de l’éducation nationale a révélé en juillet dernier que 40 % des élèves scolarisés dans un collège privé sous contrat étaient issus d’un milieu social très favorisé, contre 20 % dans le public (deux fois plus qu’il y a 30 ans). La proportion des élèves boursiers est le triple dans l’enseignement public par rapport au privé.
L'OBS : « La récente publication des indices de position sociale (IPS) de l’Education nationale souligne combien la sociologie des établissements catholiques est privilégiée : 112 pour les écoles, 114 pour les collèges, 122 pour les lycées généraux et technologiques, soit 10 à 14 points de plus que les scores du public. Si l’on exclut le rural et le périurbain et que l’on se concentre sur les agglomérations, ces écarts se creusent considérablement, oscillant le plus souvent entre 20 et 40 points. » Voir aussi leurs 7 cartes pour comprendre la ségrégation scolaire |
Globalement l’enseignement privé est moins implanté dans les quartiers périphériques de grandes villes où la mixité sociale atteint des taux d’IPS à 80 %, voire moins. C’est d’ailleurs une des faillites de la politique de la ville !
Certes ces statistiques sont nationales et la mixité sociale est plus grande dans un département comme le Maine et Loire où le privé est plus implanté, particulièrement dans les Mauges où il est parfois en situation de monopole, ce qui n’est pas le cas dans la ville d’Angers.
Gwénaëlle Audren, géographe autrice d’une étude sur le « zapping » scolaire écrit : « La ségrégation sociale urbaine se reproduit dans la carte scolaire, y compris à des échelles très fines, à l’intérieur d’un même quartier, où le privé devient un espace de refuge pour les parents. ».
Les inscriptions dans le privé sont totalement discrétionnaires, c’est la direction de l’établissement qui en décide. Cet ‘espace de refuge pour les parents’ entraine une forme de sélection à l’entrée de certains établissements privés. Le secrétaire général de l'enseignement catholique, Philippe Delorme, dans son entretien à L’OBS, le reconnaît à demi-mot : « Contrairement à ce que l’on entend souvent, ce sur quoi nos directeurs sont vigilants, ce n’est pas tant le niveau des élèves que d’éventuelles difficultés comportementales. Nous voulons nous assurer que le projet de nos écoles soit réellement partagé. Pour un élève habitué à semer la zizanie, tant en cours que dans ses relations avec ses pairs, intégrer l’enseignement catholique peut s’avérer compliqué, je le reconnais. »
Il se trouve par ailleurs que plusieurs ministres de l’Éducation Nationale successifs ont recours pour leurs propres enfants à l’enseignement privé. C’est le cas de Pap Ndiaye dont les enfants sont à l’École Alsacienne, grande école privée parisienne. Il reste peu crédible face à l’opinion publique quand il déclare vouloir accroître la mixité sociale, d’autant que la loi Debré qui régit les contrats des établissements privés avec l’État ne comporte aucun cadre juridique pour les contraindre à quoi que ce soit.
Rappelons que l’État finance l’enseignement privé sous contrat à 73 % en prenant notamment en charge le salaire des professeurs.