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Publié par LDH49

Stop à la niche fiscale Airbnb

Tribune collective dont la LDH est signataire, publiée sur Libération

Après les Etats-Unis, la France est le deuxième marché mondial de la plateforme locative. Car non seulement elle génère de conséquents revenus mais les propriétaires bénéficient d’avantages fiscaux. A l’occasion du projet de loi de finances, la Fondation Abbé-Pierre et plusieurs associations appellent à inverser la tendance pour offrir à chacun la possibilité de se loger dignement.

«Gouverner, c’est loger son peuple», disait l’abbé Pierre, pas financer Airbnb.

Alors que la loi de finances est en discussion au Parlement, élus, associations, organisations d’habitants s’unissent pour appeler le gouvernement à mettre un terme aux niches fiscales insensées dont profitent les meublés touristiques de courte durée loués notamment sur des plates-formes comme Airbnb.

15 millions de personnes souffrent de la crise du logement en France, dont 4 millions de mal-logés.

En cause, pour une part, le retard accumulé dans la construction de logements neufs, mais aussi pour partie le développement exponentiel ces dix dernières années des locations courte durée. La France représente le deuxième marché mondial de la plateforme Airbnb, leader du marché, derrière les Etats-Unis, avec un « impact économique » d’environ 10 milliards d’euros.

Comment expliquer un tel engouement des propriétaires français pour cette forme de location ? D’abord parce qu’elles génèrent des revenus bien plus importants que la location « classique ». Avec un prix moyen de 123 euros la nuit à Paris par exemple, un propriétaire qui louerait son appartement dans la limite des 120 jours autorisés par la loi perçoit en quatre mois 14 760 euros : plus que le salaire minimum annuel. Ensuite et surtout, grâce à un régime fiscal intéressant et incitatif : les propriétaires bénéficient d’abattements allant jusqu’à 71 % et peuvent même, grâce à de généreuses déductions fiscales, ne payer aucun impôt sur ces revenus.

Alors que Airbnb, multinationale cotée en bourse, n’a payé en France que 365 000 euros pour 2021, il semble que le secteur des locations de meublés touristiques, malgré son importance, ne génère que très peu de recettes à l’Etat.

La France a développé une fiscalité avantageuse pour les locations meublées à une époque où, face à la croissance du tourisme de masse, l’offre d’hébergement touristique était insuffisante. Mais ce développement se fait à présent au détriment des locations de longue durée qui ne bénéficient pas des mêmes avantages fiscaux.

Aujourd’hui, ce sont les logements qui manquent dans de nombreuses régions notamment les grandes métropoles, à Paris, Bordeaux, Lyon ou Marseille, mais aussi dans les zones touristiques, comme en Bretagne ou au Pays basque. Ces régions peinent désormais à recruter, faute de logements pour les employés. Dans les villes, la pénurie de logement pour les étudiants est exacerbée par des locations saisonnières qui atteignent jusqu’à 20 % du parc résidentiel dans certains quartiers, comme à Val d’Europe en Ile de France. Les locations touristiques repoussent les résidents locaux vers les périphéries des centres d’activité, les obligeant à effectuer des trajets de plus en plus longs entre leur domicile et leur travail, sans parler des frais de transport que cela engendre et de l’impact climatique.

Alors que des dizaines de milliers de ménages pauvres sont hébergés pendant des années dans des hôtels inadaptés à la vie de famille, les touristes sont hébergés dans des logements familiaux : on marche sur la tête !

Avec 500 000 annonces en France, les locations saisonnières, qui saturent le marché du logement, n’ont plus besoin d’être encouragées. Les règles fiscales doivent donc changer. Elles doivent désormais encourager l’investissement locatif vers du logement pour les familles, les étudiants, les salariés dans des conditions dignes et à des loyers abordables. Alors que le logement représente la première dépense des ménages, le gouvernement doit envoyer un message clair aux propriétaires : louez à l’année, vous serez mieux traités que ceux qui se tournent vers Airbnb. C’est le choix des Sables d’Olonne, qui aident les propriétaires à rénover leurs biens pour louer à l’année.

Le projet de loi de finances peut être l’occasion d’établir plus d’équité entre les bailleurs en harmonisant les régimes fiscaux et en revalorisant les baux de longue durée. Inverser la tendance pour rééquilibrer les marchés et offrir à chacun la possibilité de se loger dignement.

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