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Plus de 3 000 personnes étaient présentes ce samedi après-midi devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour exiger que justice soit rendue après le viol dont a été victime le jeune Théo, à Aulnay-sous-Bois.

Avec la diffusion des images de violence sur les chaînes TV, le risque est grand de mettre au second plan la raison de la manifestation.

Médiapart raconte dans un article signé par Amélie Poinssot

La foule est dense sur l’esplanade qui fait face au tribunal de grande instance. On croise une femme avec de grandes boucles d’oreilles « Black lives matter », des militants de la Ligue des droits de l’Homme, d’autres d’Ensemble, des syndicalistes de Sud… Des maires, aussi, venus exprimer leur solidarité avec Théo et demander que justice soit faite. Patrice Leclerc est de ceux-là. À la tête de Gennevilliers, commune voisine des Hauts-de-Seine, cet élu Front de gauche exprime son indignation : « Aucun contrôle policier ne mérite une telle violence. Ces violences policières me font peur, pour l’avenir des jeunes de ma ville et des autres villes. » Est-ce que l’usage du terme « bamboula » met de l’huile sur le feu ? « On n’est déjà plus là. L’usage de ce mot montre combien le racisme et la haine des jeunes sont banalisés. Le problème, c’est que les policiers rencontrent un monde qu’ils connaissent mal. Ça les rend violents. L’enjeu aujourd'hui, c’est de repenser le rôle de la police, renouer avec une police de proximité qui connaisse les jeunes, qui les respecte et se fasse respecter par eux. Nous n’avons pas une police de prévention ; nous avons une police de contrôle et d’intervention. »

Les acteurs de terrain sont aussi nombreux dans la foule. Parmi eux, Youssef Sayah, 51 ans, membre du collectif d’habitants de Mitry-Croix Nobillon, un quartier d’Aulnay-sous-Bois. « Il faut arrêter la justice à deux vitesses. Et il faut une vraie politique de rénovation urbaine pour cette banlieue avec un intérêt pour les jeunes, pour l’école », dit cet homme qui a endossé un T-shirt où il est écrit : « Je ne suis pas musulman, juif, chrétien, athée, bouddhiste. Je suis simplement français. » « Il y a plein d’habitants qui œuvrent dans le bon sens, ajoute-t-il. Avec notre collectif, nous avons par exemple créé un potager collectif, et nous avons fait revenir le marché après 34 ans d’absence. »

Sur une bouche d’aération transformée en tribune pour l’occasion, plusieurs personnes prennent le micro. Il y a le rappeur Sofiane, peu habitué à ce genre d’intervention. « La France nous regarde, lance-t-il. On reste calme. Il faut protéger les petits frères pour pas qu’il y ait de bavure... » Vient le tour de Jalis, un militant des Jeunesses communistes. « L’affaire Théo est une affaire qui nous interpelle. Elle est présentée comme si c’était une bavure exceptionnelle… Mais les contrôles au faciès qui dérapent la plupart du temps, c’est du quotidien ! Le racisme dans la police aujourd’hui est structurel. » Un anonyme vient témoigner des violences subies dans les commissariats : « Très souvent on nous touche les testicules, on nous met le doigt dans l’anus. C’est du viol ! Il faut le dénoncer à chaque fois. » Sous les cris de la foule, un autre homme lance : « La police est le bras armé d’un État qui nous méprise. On ne va pas croire au mythe du pays des droits de l’homme ! »

Au bout d’une heure, de menus affrontements éclatent en marge du rassemblement, entre un petit groupe d’une vingtaine de personnes et les forces de police. Une jeune femme soupire : « Ça m’énerve, on va encore dire que les jeunes issus de l’immigration ont provoqué la police. Ça se passait pourtant si bien… » L’offensive est largement sifflée par la foule pacifique qui tente de rester le plus longtemps possible dans le calme sur l’esplanade. « Flic, violeur, assassin ! » reprend-elle en chœur. Puis le face-à-face s'aggrave et s'étend jusqu'à la station de métro voisine. Flash-balls et gaz lacrymogènes fusent face aux tirs de projectiles. Plusieurs bâtiments du quartier et des véhicules feront les frais de ces débordements.

 

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